Leur thèse en poche, trois jeunes docteurs de l’Université de Strasbourg se sont engagés dans une aventure ambitieuse : la création d’une startup. Dans leur besace, leurs compétences et une idée qui ne manque pas d’éclat : créer des plantes qui brillent dans l’obscurité. Ghislain Auclair, l’un des trois docteurs-entrepreneurs, nous en dit plus sur ce projet baptisé Greenovation.
Pouvez-vous nous raconter la genèse de ce projet ?
A la fin de ma thèse en épigénétique en 2015, je me suis rendu compte que je voulais faire de la science mais pas forcément de la recherche. J’ai réfléchi aux défis actuels à résoudre et à ce que je pouvais faire avec mes compétences. Bien souvent, les grandes villes font face à des problèmes de pollution de l’air et de surconsommation d’énergie. Comment la biologie pourrait permettre d’y répondre ? Dans la nature, certains organismes sont capables d’émettre de la lumière. Pourquoi ne pas doter des plantes de cette capacité de bioluminescence ? Elles émettraient de la lumière sans consommer d’électricité, dépollueraient l’air via des voies de biochimie végétale classique. Elles seraient aussi totalement recyclables. Pour étudier cette idée, je me suis entouré de deux autres docteurs de l’Université de Strasbourg, Rose-Marie Vesin, cancérologue et Rémy Kreder, chimiste. On a étudié le marché et on s’est rendu compte que cela pouvait être très intéressant pour les collectivités. Un designer en décoration d’intérieur était également intéressé, alors on s’est lancé.
Cette idée est-elle inédite ?
Nous faisons face à une certaine concurrence. Deux startups aux USA essayent de créer des plantes bioluminescentes à l’aide de gènes utilisés depuis longtemps dans la recherche. Elles ont réussi à faire plusieurs plantules mais la bioluminescence n’est pas visible à l’œil nu. En France, une startup propose des néons contenant des bactéries bioluminescentes pour décorer les villes. De notre côté, nous avons identifié une nouvelle molécule de bioluminescence émettant potentiellement beaucoup plus de lumière. La produire dans les plantes plutôt que des bactéries permettra d’obtenir quelque chose de stable dans le temps et de commode à entretenir.
Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Avant d’arriver à la plante bioluminescente, plusieurs étapes clés devront être validées, sans quoi le projet s’arrêtera. On a besoin de travailler six mois dans un laboratoire pour obtenir une première preuve de concept. Ensuite, on estime pouvoir aboutir à un prototype après encore 18 mois de travail.
Notre projet séduit. Nous avons gagné plusieurs prix. Grâce à ces prix et à des apports personnels, nous avons déjà réuni un capital, mais il reste encore insuffisant pour financer l’étape de preuve de concept. Et sans preuve de concept, pas de start-up…. Beaucoup de laboratoire sont prêts à nous rendre service en nous fournissant un bout de paillasse mais il faut donner un cadre juridique à cela. Malheureusement, malgré notre réussite dans les concours, l’université n’est pas en mesure de nous aider.
Pour l’instant, on fait surtout de la bio-informatique qui ne nécessite qu’un ordinateur et peu de moyens financiers. Dès que nous aurons réuni suffisamment d’argent, on paiera l’accès à un laboratoire pour pouvoir continuer. On espère avoir le soutien de la French Tech Alsace.
Propos recueillis par Ronan Rousseau
Cet article Étudiants et innovants - Greenovation : s’éclairer à la lumière des plantes est paru initialement sur Alumni Unistra - actualités.
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