Nous vous en parlions il y a deux semaines, le 9 mai dernier a eu lieu la conférence Alsace Tech 4.0 qui portait sur « l’IoT au service de la maintenance dans l’usine du futur ». D’une durée d’à peu près 1h45, elle a laissé la parole à 4 intervenants qui ont fait face à un amphithéâtre bien rempli (non seulement d’entrepreneurs, mais aussi d’étudiants). Voici donc pour ceux n’ayant pas pu se rendre à cette conférence un résumé succinct des quatre interventions.
18h25 Introduction
Avant d’entrer dans le vif du sujet, Christophe Collet, le directeur de Télécom Physique Strasbourg (l’école où se déroulait la conférence) s’est exprimé sur la problématique de l’IoT. Il a expliqué qu’étant conscient de l’importance qu’allait prendre l’internet des objets dans l’entreprise dans les années à venir, l’école avait ouvert dès 2000 les filières que sont Technologies de l’Information de la Santé (TI-Santé) et plus récemment Réseaux & Télécoms – Infrastructures Numériques et Objets Communicants (RT-INOC). Il a ensuite laissé la place à Madame Dominique Vivé, chef du projet Usine du Futur d’Alsace Tech. Cette dernière a expliqué qu’il y a quelques années, la région Alsace a demandé aux grandes écoles de s’orienter vers les entreprises afin de pouvoir les accompagner dans la transformation vers l’Usine du Futur. Cette évolution verra l’avènement d’une industrie connectée à ses clients et fournisseurs capable de satisfaire rapidement les nouvelles attentes de ceux ci.
18h30 De l’ IoT à la DATA
C’est ensuite monsieur Geoffroy Muller qui a pris la parole. Directeur technique chez HYPROMAT (le groupe possédant l’enseigne Eléphant Bleu), il a commencé par présenter rapidement l’entreprise. Il s’agit donc d’une PME Franco-Suisse comptant 150 salariés et plus de 570 centres de lavages en France tournant en moyenne à 250 000 véhicules lavés chaque weekend. L’inconvénient pour une telle PME est bien entendu l’étalement du site de production sur la totalité de la France.
A l’époque, l’entreprise reposait sur deux « leviers » pour sa croissance : développer le réseau en installant de nouveaux centres, ou moderniser le parc actuel en mettant à jour les composants ou en proposant de nouveaux modèles de borne. Malheureusement, ces deux leviers dépendent énormément du foncier, ce qui les laissait face à une vitesse d’investissement aléatoire, il était donc nécessaire de développer un « troisième levier ».
Cette idée, c’était la possibilité pour le client nettoyer sa voiture avec un système d’aspirateurs, afin de pouvoir fidéliser les 86% de personnes lavant leur habitacle chez eux. Aujourd’hui encore, les aspirateurs d’HYPROMAT font face à deux problèmes principaux : la borne est parfois hors-service et les aspirateurs ne sont pas toujours assez forts. Le souci principal lié à ces deux points étant qu’ils varient pour chaque borne d’aspiration qui arrive à l’usure. Il fallait donc trouver un moyen pour la machine de « prévenir » à la fois HYPROMAT et les établissements franchisés avant que le problème survienne.
C’est ici qu’intervient l’internet des objets : HYPROMAT a réussi à concevoir un dispositif qui mesure plusieurs appareils en simultané et permet d’apporter un retour d’information au propriétaire franchisé. Sans rentrer dans les détails, le dispositif étudie les signaux spectraux de différents capteurs durant le fonctionnement, puis parvient grâce à un algorithme de machine learning à identifier une machine qui commence à mal fonctionner puis averti le propriétaire du besoin de maintenance (par exemple, la baisse de la fréquence de rotation indiquera la panne probable d’un des pistons).
M. Muller a conclu sa présentation en précisant que ce résultat avait été obtenu en travaillant avec les écoles locales, et a assuré aux entrepreneurs présents que le bilan était très positif. De plus, une telle collaboration permettait de prendre le temps de discuter avec les experts et de développer des apprentissages. Actuellement, l’IoT permet donc à HYPROMAT de couvrir deux des quatre étapes de la chaîne en assurant satisfaction au client et à l’exploitant franchisé et espère rapidement couvrir toute la chaîne en s’étendant au support et au management.
18h50 de la DATA à l’ IoT
Ce fut ensuite l’intervention de M. Gilles Knoery, directeur général de DIGORA. A l’origine, il s’agit d’une entreprise spécialisée dans l’informatique de gestion (elle peut, par exemple, rendre accessible 24/7 à un hôpital la base de données contenant les dossiers patients). Elle compte aujourd’hui 450 clients (dont 150 suivis 24/7), 110 collaborateurs et possède un chiffre d’affaire de 21 millions d’euros. Discutant de l’impact des tarifs actuels du Cloud quant au choix d’un fournisseur par une entreprise, M. Knoery a pointé du doigt l’importance de capter des données pour créer de la valeur. Ces données revêtent ensuite une certaine importance en fonction de leur qualité ou de leur type (un pixel de caméra de vidéosurveillance aura moins d’importance qu’un octet compris dans une transaction boursière).
Alors que l’entreprise se contentait initialement de gérer les informations, elle a commencé il y a peu à intégrer des solutions de maintenance à distance pour ses clients. M. Knoery a donc donné quelques exemples de ce que son entreprise était désormais amenée à faire. DIGORA a par exemple été sollicitée par une entreprise de chantier qui souhaitait assurer la traçabilité de ses biens d’équipements. Bien que la requête puisse à première vue s’avérer surprenante, il n’est malheureusement en réalité pas rare que des objets comme les coffrages à bétons disparaissent des chantiers. L’entreprise souhaitait donc être capable de géolocaliser tous les équipements de chantier. Le challenge pour DIGORA étant donc ici de faire en sorte pour l’entreprise que le gain apporté par la géolocalisation soit supérieur au coût de remplacements des équipements volés.
Après avoir donné d’autres exemples, M. Knoery a terminé sa présentation en montrant le résultat d’un projet ingénieur en collaboration avec TPS pour l’implantation de sa plateforme IOT 4.0. Le projet en question consistait en une petite boîte blanche d’où dépassait une antenne. Il s’agissait en fait d’un capteur connecté en LoRaWAN à tout un réseau d’autres capteurs afin d’analyser l’environnement physique de lieux de travail. Ce projet, mené en 2ème année de la formation RT-INOC est une réussite.
19h10 Formations et recherche
Le troisième intervenant était Thomas Noël, directeur adjoint d’ICube et enseignant-chercheur à TPS afin de présenter la filière RT-INOC. Alors que les données proviennent de plus en plus de systèmes autonomes, il naît un besoin d’ingénieurs en mesure de concevoir/gérer/déployer les nouveaux équipements et les réseaux associés. Les ingénieurs RT-INOC sont donc non seulement capables de concevoir des objets connectés, mais aussi d’établir les infrastructures numériques qui achemineront les données à la database.
Assez éloigné des modèles existants d’ingénieurs, Thomas Noël a justement désigné cette promotion comme étant le « chaînon manquant » entre les ingénieurs de traitement du signal, d’automatique et d’électronique numérique. Tout comme les autres formations proposées à TPS, celle-ci bénéficie d’un fort adossement à la recherche, avec le laboratoire ICube. Celui-ci possède trois plateformes de tests : la première est le FIT qui contient 400 objets connectés, 45 robots mobiles et deux serveurs permettant de faire des tests sur la densité, la perte et la remontée de l’information. La deuxième plateforme est iBat qui contient 200 objets supplémentaires et ce mois de juillet 2017 verra l’ouverture en test libre de la plateforme LoRa sur la totalité de Strasbourg pendant 18 mois afin d’effectuer des expérimentations indoor/outdoor.
Avant de passer le relais, M. Noël a conclu sur le fait que les ingénieurs RT-INOC devront faire face sans-cesse à de nouveaux défis, car il ne pourra pas exister une seule et unique technologie pour l’IOT, ne serait-ce qu’en prenant en compte des paramètres comme la consommation énergétique qui sera un choix propre à l’entreprise requérant leur services.
19h30 La plateforme FIT (Future Internet of Things) au service des entreprises
Avant de laisser place à la table ronde, la conférence prévoyait une dernière intervention de Guillaume Schreiner, chercheur au laboratoire ICube. Celui-ci a donc fait la démonstration de la plateforme FIT. Issue des investissements de l’avenir en 2011, elle contient près de 400 nœuds/plateformes qui peuvent être réservés en ligne par n’importe qui pour effectuer des tests. Cette plateforme permet de tester à plus grande échelle les objets communicants, ceux-ci n’étant pas de simples émetteurs/récepteurs comme l’on tend à les simplifier dans les modèles théoriques.
Afin d’illustrer son propos, M.Schreiner avait réservé 60 nœuds de la plateforme pour se lancer dans quelques démonstrations. Créant un réseau entre les 60 nœuds (dont deux d’entre eux étaient positionnés sur des robots en mouvement), celui-ci évoluait au fur et à mesure des déplacements des robots et des instructions envoyées (depuis un unique lien à internet en début de course, le reste étant lié en radio), et il a pu, par exemple, éteindre à distance les lumières de la salle ou les rallumer. M. Schreiner a donc conclu la conférence, en rappelant que ce réseau était accessible à tous pour peu qu’on réserve les nœuds au préalable.
N.D.A : la conférence n’était pas à proprement parler terminée, il y a eu après ça une vingtaine de minutes de questions autour d’une « table ronde », néanmoins les questions étant plus spécifiques pour les personnes les ayant posées, nous ne les avons pas retranscrites ici.